LE MYTHE DE LA BONNE GNOSE*

*Article des cahiers de Jean Vaquié

 

INTRODUCTION D'ALLIANCE DU TRONE ET DE L'AUTEL

  Ce mythe est presqu'un copier/coller du mythe de la bonne et mauvaise maçonnerie mais vu que la franc-maçonnerie est  impopulaire auprès des catholiques on tente plutôt de les attraper par la Gnose.  L'opposition bonne gnose/mauvaise gnose est très présente dans la fiction ex: Star Wars sous les noms "pouvoir de la force" qui serait la bonne Gnose et le coté obscur de la force qui serait la mauvaise Gnose; les bonnes fées aux pouvoirs magiques opposées aux méchantes sorcières...  Ainsi par les médias et la fiction tout est fait pour rendre la Gnose séduisante d'où l'importance d'avoir quelques bases afin de détecter ce poison lorsqu'il se présente. 

  L'esprit gnostique est tellement éloigné de l'esprit de foi qu'il n'est pas dangereux quand il se présente tel qu'il est. Par exemple, aucun catholique traditionnel n'aurait l'idée d'emboiter le pas à la gnose de la franc-maçonnerie. Malheureusement il existe toute une frange de néo-gnostiques, qui se présentent comme de fervents catholiques et qui font des efforts prodigieux afin d'acquérir droit de cité dans l'intelligentsia du traditionalisme. Pour servir de vecteur à la pénétration de leurs doctrines, ils ont inventé le mythe de la bonne gnose.

  Et ils suggèrent d'utiliser désormais, dans le langage ecclésiastique courant, le mot gnose pour désigner la science de Dieu. Ce serait, disent-ils redonner à cette science son véritable nom. Ce serait même, ajoutent-ils, combler une lacune dans la terminologie latine. Car l'absence de ce mot empêche l'Eglise de cultiver les trésors qui sont en elle et qu'elle ne connait plus.

  Répondons tout de suite qu'il n'y a aucune lacune à combler. La chose, et le terme pour la désigner, existent depuis toujours dans l'Eglise d'occident: la "science de Dieu" n'est rien d'autre qu'une théologie. C'est elle qui formule, en langage explicatif humain, ce que l'Ecriture exprime en langage condensé Divin. Cette science de Dieu, ou théologie, est certes nécessaire pour rendre accessible à l'esprit des fidèles des vérités révélées mystérieusement exprimées dans l'Ecriture et dans la tradition apostolique. Mais, encore une fois, cette science divine, élaborée sous l'autorité du magistère, n'a pas attendu les néo-gnostiques pour être formulée dans l'Eglise latine.

  Que l'Eglise Grecque, pour sa part, utilise le mot gnose pour la désigner, rien n'est plus naturel puisque c'est le mot Grec qui signifie science. Mais ce mot Grec n'a pas été utilisé couramment dans l'Eglise latine pour désigner la théologie (sauf quelquefois, à titre de synonyme, par quelques rares stylistes désireux d'éviter les répétitions).

  Le cas le plus probant est celui de saint Jérôme qui a établi la traduction latine, dite "Vulgate", de l'Ecriture. Quand il s'est trouvé dans la nécessité de transposer le mot "gnosis", fréquent chez saint Paul, il s'est bien gardé de le conserver tel quel dans le latin et il l'a traduit par Scientia. A telle enseigne que ni le mot gnose ni le mot "gnosis", ne se trouvent dans les dictionnaires de concordance. C'est bien la preuve qu'ils n'étaient pas utilisés dans le latin ecclésiastique du temps de saint Jérôme. Son adoption à l'heure actuelle serait le même de l'innovation sous la couleur d'archaïsme. C'est l'un des procédés des modernistes.

  Il serait même extrêmement dangereux d'utiliser ce mot pour désigner la science divine, ou théologie, et cela pour deux raisons.

  A. D'abord à cause du contenu notionnel de la gnose historique que le terme ne tarderait pas à entrainer avec lui. Il véhiculerait toute la mythologie, Valentinienne et néo-platonicienne, comme par exemple les éons, la Sophie, le Démiurge, la tripartition, le "Père-Silence", etc. Nous n'avons vraiment pas besoin de tout cet apport au moment où l'identité doctrinale de l'Eglise se dilue déjà bien assez dans le marécage œcuménique.     

  B. Et puis aussi, le mot est dangereux, indépendamment du contenu notionnel historique qu'il véhicule, et voici pourquoi? Dans la littérature néo-gnostique actuelle, le mot gnose est polyvalent, il a plusieurs significations. Si donc il était adopté dans l'église latine, il serait employé dans plusieurs sens, ce qui ajouterait à sa malfaisance.

  Voici les sens qu'on lui trouve sous la plume des néo-gnostiques, lesquels les emploient d'ailleurs indifféremment, passant de l'un à l'autre sans avertir:

  1.  Gnose peut signifier d'abord science de Dieu, au sens livresque et discursif du terme. C'est le sens théoriquement innocent sous lequel on voudrait nous le faire adopter.

  2.  Gnose peut signifier encore la connaissance intuitive de Dieu, celle que procure l'expérience mystique personnelle. Et l'ambition des néo-gnostiques est précisément de faire, de cette connaissance expérimentale, une des sources de la doctrine. Ce serait, en somme, reconnaitre l'exequatur entre révélation publique et révélation privée.

  3. Gnose peut aussi signifier Salut par la Connaissance. Ce qui procure le salut, ce ne sont plus "les œuvres de la foi", c'est la connaissance. On est jugé, non plus sur la conduite, mais sur sa connaissance.

     Et comment obtient-on cette "connaissance salvifique"?

      - tout simplement par l'initiation.

On dit alors: 《un tel a acquis la gnose libératrice》.

  4. Gnose désigne également une attitude intellectuelle particulière en face des mystères de la révélation. C'est une attitude d'Elucidation à tout prix. Ni la création, ni même la vie intérieure de Dieu ne comportent de mystères que l'esprit humain (lui-même divin d'ailleurs), ne soit capable de comprendre. Cette attitude d'esprit est tout à fait étrangère à l'Eglise, laquelle enseigne que les mystères ne sont pas faits pour être compris, mais pour être contemplés. Telle est la vraie sagesse.

  5.  Gnose désigne enfin, dans un sens tout à fait général, la Théologie de la religion universelle à laquelle les sociétés de pensée et les congrégations initiatiques travaillent mondialement. Dans ce sens, gnose est alors synonyme d'ésotérisme.

  Comment ne pas voir que ce malheureux mot servirait finalement à faire pénétrer dans notre "Science de Dieu" toutes sortes de données provenant de la fausse mystique et de l'ésotérisme le plus hétérodoxe? C'est tellement évident que l'on se demande si tel n'est pas précisément le but de la manœuvre.

  Une telle adoption serait aussi désastreuse pour la doctrine que le nouvel "Ordo Missae" la été pour le culte. Il est d'ailleurs vraisemblable que la Bonne Gnose et le Nouvel Ordo sortent du meme bocal. Il a été souvent démontré que ce bocal est maçonnique.

Jean Vaquié 

 

CONCLUSION D'ALLIANCE DU TRONE ET DE L'AUTEL

  Cette analyse a été choisie car elle est formatrice, ça n'est d'ailleurs pas pour rien que Jean Mgr Lefebvre avait remercié Jean Vaquié pour ses travaux sur l'école moderne de l'ésotérisme chrétien.

 

Le 28 avril 2024

Jean De Grive